Brol #11 – Du réchauffé
Publié le 27 septembre 2017
Olala, ce manque de rigueur là ! Deux jours sans brols !
En fait pour le moment j’ai vraiment énormement énormement de boulot, y compris en soirée parfois, (+une rénovation à gérer) (+la vie) donc c’est un peu difficile de tout concilier, mais allez faut que j’essaie de m’y tenir quand même, à ces ptits brols. Vous êtes plusieurs à m’avoir gentiment rappelé à l’ordre, j’adore !
Je reviens avec un brol qui sent un peu le réchauffé, parce qu’il s’agit d’un petit mot que j’avais publié il y a quelques temps sur mon mur Facebook. Mais comme ça il sera ici aussi, ça me laisse une meilleure trace que Facebook où tout s’oublie très vite, et puis comme ça ceux qui l’avaient raté peuvent le lire quand même. Et j’ai rajouté quelques références de brols à lire ou à regarder à la fin (pour toi Martcha hihi).
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Je crois que j’ai commencé à réfléchir à cette question aux alentours de 2008-2010, dans ces années-là, au détour de l’un ou l’autre article sur le sujet qui me sont tombés sous la main, de l’une ou l’autre discussion, et j’avais commencé à conscientiser la problématique mais sans me sentir vraiment tout à fait concernée. Faut dire que ces années-là, à part les amours, les copains, faire la fête et réussir mes examens deux fois par an, pas grand-chose d’autre ne m’intéressait vraiment profondément.
Ensuite, j’ai travaillé aux Tanneurs en 2013 sur le spectacle de Maria Clara Villa Lobos, Mas-Sacre, qui s’intéressait à la question de la surproduction et surconsommation de viande et de notre rapport schizophrénique aux animaux. J’ai un peu approfondi à ce moment-là la réflexion, sous l’angle surtout de « l’objectivation » que l’on fait des animaux lorsqu’on les consomme comme n’importe quel autre produit : le bout de poulet sous plastique que nous achetons au supermarché n’a vraiment aucun lien pour nous avec un être vivant. Et pourtant, les similitudes entre poulet et humain sont grandes (Ne vous inquiétez pas, j’aurais ri moi-même d’écrire une phrase pareille et d’ailleurs je n’assume toujours qu’à moitié !)
Le spectacle le montrait avec une très belle image : une des danseuses et un poulet mort de dos dans une lumière tamisée faisaient les mêmes gestes (le poulet manipulé par un autre danseur) et la similarité entre les deux silhouettes était impressionnante. Scène poétique et magnifique qui m’est restée en tête longtemps. Bref, à l’époque à nouveau : prise de conscience de cette mort organisée d’êtres vivants et début d’empathie pour les animaux. Mais je maintenais (et maintiens encore maintenant) qu’il vaut mieux s’intéresser au bien-être des humains qui nous entourent – proches ou lointains, connus ou inconnus – qu’à celui des animaux. J’ai aussi regardé plusieurs reportages à ce moment-là, Love Meat Tender entre autres.
On avait d’ailleurs à l’époque organisé des petites conférences / rencontres / débats après les représentations du spectacle avec diverses associations et je me souviens avoir été parfois dérangée par le prosélytisme et l’impression de culpabilisation qu’ils me renvoyaient. En fait en tant que consommatrice de viande je me sentais acculée, jugée, avec une impression désagréable de mal faire les choses, d’être mauvaise.
Je pense qu’il sera toujours contreproductif de dire à quelqu’un « tu manges de la viande tu es horrible tu n’as rien compris c’est inhumain c’est mauvais pour ta santé et tu tues la planète ». D’abord parce que chaque personne, selon son parcours, ses intérêts, sa sensibilité, sera touchée par différents arguments (d’aucuns l’éthique animale, d’autres l’impact environnemental ou encore les aspects de santé personnelle / santé publique, etc.). Ensuite parce que la posture moralisatrice et culpabilisante du discours de la personne sûre de bien faire donne plutôt envie de s’enfuir élever des chèvres le plus loin possible plutôt que de s’interroger sur les conditions et conséquences de leur élevage !
Finalement, et c’est sans doute le plus prégnant, parce que je pense que nos habitudes alimentaires sont ancrées dans un système qui ne se déconstruit pas si facilement (un peu comme le patriarcat même si dans une moindre mesure) et que dans ce contexte même les meilleurs arguments du monde provoqueront toujours une réaction de rejet, même si parfois de mauvaise foi, parce que ça touche à quelque chose de finalement très intime autant que quotidien.
Je pense que la prise de conscience/le déclic peuvent se faire de plein de manières différentes mais sont toujours personnelles, et même intimes. Les conversations avec des personnes non-culpabilisatrices qui n’oublient pas qu’elles ont aussi été consommatrices de viande (et de plein d’autres saloperies) et qu’elles le sont encore de toute façon parce que la consommation parfaite est impossible, les lectures d’articles ou d’ouvrages bien documentés, les documentaires peuvent évidemment aider.
De mon côté, c’est vraiment la prise de conscience des impacts environnementaux et des conséquences plus que désastreuses sur la planète de la production massive de viande et de l’industrialisation de la nature qui m’ont fait passer le cap, le tout couplé à une réflexion plus « politique » sur notre finalement seul pouvoir individuel : celui que l’on a en tant que consommateur. Le fait de comprendre aussi que cette industrialisation se fait toujours au détriment des plus faibles, que ce soit dans la campagne des pays du Sud ou dans les abattoirs de ceux du Nord et approfondir la connaissance des liens malsains entre industrie, agriculture, alimentation, économie, société, relations Nord-Sud, dégats directs et indirects sur la terre…
Voilà donc finalement j’ai compris petit à petit que je pouvais avoir un impact positif et agir à mon échelle dans le sens des valeurs qui me sont chères en arrêtant de manger de la viande mais aussi en consommant localement / de saison de manière plus responsable. J’avais déjà pas mal œuvré en ce sens et diminué la viande puis j’ai vraiment arrêté le 1er janvier, en mode bonne résolution. J’ai « craqué » quand même quelques fois depuis, mais vraiment très peu. Je suis en aussi bonne voire en meilleure santé, bon j’ai pas maigri parce que j’aime toujours autant la bonne bouffe (et les apéros hihi) et qu’il y a moyen de faire tout ça en étant végétarien et sans emmerder les autres qui ne le sont pas ! (merci d’ailleurs à Thomas qui est le meilleur cuisinier végétarien du monde, sisi)
Je ne sais pas pourquoi je vous raconte tout ça ici aujourd’hui parce que d’habitude j’en parle pas trop, sauf si on vient me titiller sur le sujet. Peut-être parce que dans ma guinze à Dour j’avais vraiment super envie d’un bon gros hamburger mais que j’ai résisté ! (Ouais parce que à la base, j’adore la viande et les gros burgers en fait).
Je sais bien par ailleurs qu’il ne s’agit que d’une goutte d’eau dans l’océan mais je ne sais que trop bien l’impuissance face aux désastres alors j’aime bien croire à la puissance de chaque gouttelette. C’est aussi sans doute une façon de me rassurer, de me déculpabiliser d’être née du bon côté du monde avec autant de chance et de privilèges et de vivre ma vie de manière générale de façon très égoïste. Les masses sont composées d’individus et je pense vraiment que pour aller vers un monde un peu plus juste et propre, chacun peut amener la goutte d’eau de son choix, qui correspond à ce qu’il a envie d’être ou de faire.
Si par hasard le sujet vous intéresse et que vous voulez des chiffres, des articles, des bouquins, des reportages…
Je vous conseille l’enquête de Fabrice Nicolino « Bidoche », l’essai de Jonathan Safran Foer « Faut-il manger les animaux? » ou encore le reportage « Cowspiracy » (disponible sur Netflix).
Il y a également cet article d’Agnès Stienne dans le Monde Diplomatique qui est assez concis et toutefois complet http://blog.mondediplo.net/2012-06-21-Quand-l-industrie-de-la-viande-devore-la-planete..
Il existe aussi d’autres vidéos au format plus court, comme celle-ci par exemple : http://www.lemonde.fr/planete/video/2015/03/20/le-vrai-poids-de-la-viande-sur-l-environnement_4597689_3244.html
Voilà !
Bisous les copains et à demain pour un nouveau Brol !