Brol #39 – la douche du retour

Publié le 15 novembre 2018

Aujourd’hui m’habite le même genre de sentiment qu’au retour d’un camp scout : le plaisir, presque le soulagement d’un retour chez soi mêlé à une grande, à une immense nostalgie.

La sensation simultanée et ambiguë de retrouver sa zone de confort tout en la quittant. On peut prendre une bonne douche bien chaude, se démêler enfin les cheveux (imaginez le boulot ici!) et mettre des vêtements propres.

L’eau coule, coule et nous libère, nous débarrasse de cette trace de boue collante, persistante et des peluches grisâtres non-identifiées qui nous grattaient entre les orteils.

(Bon en fait je vous passe les détails des horreurs corporelles parce que si vous voulez tout savoir, parfois le jeu était de se laver le moins possible et on pouvait tirer une certaine fierté de n’avoir été qu’une fois dans la rivière en 15 jours.. Tout ça donc pour dire que la douche au retour elle faisait zizir pas pour rire – aussi ou surtout pour notre entourage immédiat – et que l’eau qui s’écoulait était tout sauf transparente.. ok, j’ai dit que je vous épargnais les détails!).

On sait aussi que la nuit qui nous attend sera douce même si solitaire, qu’on dormira dans un lit confortable, dans une maison chauffée, dans des draps doux. On secoue la tête pour se sécher les cheveux et mille gouttelettes s’en échappent avec un petit bruit de perles, on passe un t-shirt tout frais, ça sent la lessive et l’été, et on se sent renouvelée, revigorée, fraîche, légère, comme libérée. Et ça fait tellement tellement tellement, tellement de bien.

Mais on doit aussi dire au revoir aux copains et copines, aux amis et amies, aux animateurs et animatrices avec qui on vient de vivre 2 semaines d’une expérience forte, intense, folle : un quotidien de groupe, parfois bancal, des rencontres précieuses, des rires, des désaccords, des moqueries, des trahisons, des blessures, des larmes, des moments qui soudent, d’autres qui défont ou qui font mal, des contraintes et des libertés, des tentatives, des essais, des chantiers (chantier!), des constructions, des idées, des silences dans la nuit froide, des discussions infimes, des discussions infinies, des discussions intimes, des fêtes, des questions, des blagues, des propositions, des demandes en suspens, des attentes, des mains qui se serrent, des découvertes, du respect et son contraire, de l’écoute, de l’espoir, des prises de conscience, des matins diffficiles, de l’amitié, de l’amour, des danses, des chants, des jeux, des grandes joies, des déceptions, des courses sans fin, des combats, des tiraillements, de l’énergie, de l’épuisement, du courage, de la résistance, des lâchetés, des bras qui tombent et des mâchoires qui se décrochent, du temps qui file, du temps rapide, du temps chargé, du temps perdu, du temps gagné, des chutes, de la douceur et du sel, du changement, la perte de l’espoir, l’envie de partir, l’envie de rester, l’obligation de partir, la peur, la confiance, régresser parfois, grandir souvent, évoluer toujours.

(Bon je compare avec un camp scout mais dans un autre registre j’imagine qu’à la fin d’une saison de Secret Story les candidats peuvent aussi balancer ce genre de trucs! #tropdsentiments! )

Il s’agit ici du plus long camp de ma vie puisqu’il a duré presque 6 ans.

Merci Les Tanneurs, merci Marie et David pour la confiance que vous m’avez accordée à l’époque malgré mon jeune âge et ma grande naïveté, merci Lila, Anna, Patricia, Alain, Fred, Theo, Gauthier, Lotfi, Cedrik, German, Driss, Amaury, Martin, Catherine, Émilie, Deborah, Michele, Camille, Coline, Vincent, Jennifer, Olif, Simon, Aurélie, Anne-Lise, Lucien, Guillaume, Thomas, Zeno, Zoé, Simon et Petra, Frédéric et Denis, Greg, Betty, Pauline, Mathieu, Julie, Mélanie, Benedicte, Laurence, Marlène, Kevin, Bastien, Isabelle, Clara, Gaspard, Leila, Wendy, Sophie, Manon, Rachel, Gabrielle, Camille, Myriam, Tarquin, Catherine et Alexandre, tous ceux qui ont été mes collègues de près ou de loin et avec qui j’ai vécu des morceaux de tout ça, pardon j’en oublie plein dans les Compagnies. Merci aussi à tous les artistes, journalistes et collaborateurs divers avec qui j’ai eu la chance de travailler et d’échanger. Un merci particulier aux artistes au contact desquels ma pensée a pu s’aiguiser, mes questionnements se multiplier, mes certitudes s’éroder, mes sens se développer. Merci pour ce qu’ils m’ont appris du monde ou de l’humain. Un merci particulier à ceux d’entre eux poètes, écorchés, respectueux, à ceux avec lesquels la relation est tissée de confiance et ainsi rendue infiniment précieuse.

Je repars un peu moins naïve (c’est un euphémisme), un peu usée, mais tellement grandie et riche de tant de choses. J’aurai tellement ri et tellement pleuré dans cette salle. Merci les Tanneurs pour tout ça.

Voilà ! Sinon j’ai aussi super hâte des nouvelles aventures et des beaux défis qui m’attendent (coucou Tissu Orange, mon prochain camp c’est avec vous ! Et coucou aussi la vie de freelance !)

PS : Y’a un truc qu’on faisait, nous, à la fin des camps scouts : se retrouver après notre douche pour aller manger des frites, boire des bières et signer nos foulards. On se fait ça quand vous voulez